Les rappels à l’ordre du rapport Pronovost

Territoire et ruralitétag haut droite

romeo bouchardRoméo Bouchard, co-fondateur de l’Union paysanne et ex-coordonnateur de la Coalition SOS-Pronovost. [email protected]

On appelait autrefois les agriculteurs des « paysans » ou des « habitants », c’est-à-dire ceux qui font et qui habitent le pays. Et c’est effectivement ce qu’ils étaient. Ils nourrissaient leur famille et leur communauté, ils peuplaient les villages et les rangs, s’occupaient des écoles et des usines de lait ou de poisson, ils dessinaient les paysages et les chemins, ils entretenaient et protégeaient l’environnement, les rivières et les ruisseaux, les boisés, les oiseaux et les animaux sauvages, en un mot, l’ensemble des écosystèmes et de la biodiversité du territoire habité.

En devenant des producteurs et exploitants d’une agriculture de plus en plus commerciale et spécialisée, axée sur les marchés mondiaux, nos agriculteurs ont cessé en bonne partie de nous nourrir, de préserver notre environnement, de peupler nos campagnes, d’occuper notre territoire et d’assurer notre rapport vivant à la nature. Notre nourriture vient de partout et nulle part. Les fermes se sont se sont spécialisées et concentrées dans de grosses entreprises et dans les régions centrales. Les terres se vendent à des compagnies. Même le zonage agricole empêche que ne s’établisse toute activité autre que la grande agriculture dans la zone verte, même en régions de dépeuplement. La rentabilité des entreprises agricoles valant des millions est désormais pratiquement la seule préoccupation des agriculteurs et de ses dirigeants.

Les agriculteurs contrôlent l’ensemble du territoire habité. Le rapport Pronovost est venu rappeler que l’agriculture n’a pas pour seule mission de produire de la nourriture et d’augmenter le PIB brut. Le type d’agriculture qu’il recommande est donc une agriculture plurielle, c’est-à-dire « diversifiée par la taille de ses installations, par ses méthodes de production et par la gamme de ses produits »; une agriculture multifonctionnelle, qui en plus d’être créatrice de richesse et d’emplois, contribue étroitement à l’occupation dynamique du territoire », une agriculture qui a à cœur la souveraineté et l’autosuffisance alimentaire du Québec.

En conséquence, le rapport insiste sur l’importance de faire davantage de place à l’agriculture de niche et de proximité, à l’agriculture biologique, à un soutien financier modulé davantage sur la localisation, la taille et les pratiques agricoles des fermes que sur les seuls volumes de production comme dans l’ASRA actuelle.

Au chapitre de l’environnement, le rapport plaide en faveur d’une écoconditionnalité des aides plus exigeante, d’un encadrement plus rigoureux des OGM et de l’usage des pesticides, hormones et antibiotiques de croissance ainsi que de la protection des cours d’eau, boisés et milieux humides. Il prône clairement la transition écologique de notre agriculture : une agriculture durable.

Une des contributions les plus importantes du rapport concernant l’occupation et l’aménagement du territoire se situe dans les réformes recommandées au chapitre de la gestion du territoire agricole. Pour sortir de la gestion centralisée au cas par cas qui prévaut à la Commission pour la protection du territoire agricole (CPTAQ), le rapport proposait de maintenir à la CPTAQ les décisions concernant les exclusions de la zone agricole, mais de confier aux MRC, qui ont déjà le mandat de l’aménagement du territoire, la gestion des usages agricoles en zone agricole sur la base d’un plan de développement de leur zone agricole (PDZA). Il proposait également d’autoriser d’office une liste d’activités jugées complémentaires à l’agriculture.

Dans le cas des programmes de soutien financier et de la gestion de la zone agricole, en dépit du fait que des rapports subséquents de Michel Saint-Pierre et de Bernard Ouimet aient conclu à la faisabilité des réformes recommandées, à peu près rien n’a été fait et l’opposition de l’UPA ne s’est pas démentie sur ces deux secteurs majeurs comme sur les autres.

Crédit Photo: Mélanie Crête 

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